L'aventure paternelle, contée par un papa parmi tant d'autres... De bisous en câlins, de bouderies en cacas, je n'ai pu que constater qu'être père, ça n'a rien de facile. Mais avec un peu de bonne volonté, beaucoup d'amour et une citerne de savon (biologique, sans parfum, sans colorant, sans phosphate et sans savon...), on peut y arriver! Et les récompenses sont belles...

dimanche 5 décembre 2010

Danger, Moumou Robinson, danger!

Notre relation avec le danger évolue toujours.

L'innocence de la jeunesse a ceci de bien qu'elle permet de prendre des risques qui ne sont plus même imaginables une fois que la raison a envahi l'immédiat. La langue anglaise a cette expression : Ignorance is bliss (plus ou moins : "moins on en sait, mieux on se porte", et je vous passe la référence biblique, parce que je suis gentil aujourd'hui, tiens).

Flashback : vers l'âge de huit ou neuf ans, mes compagnons et moi avions l'habitude de monter dans ce grand pin, au bout de la rue près de chez moi. Arbre énorme. À trois, nous arrivions à peine à faire le tour de son tronc avec nos bras. Mais nous montions dans ce géant, sans égards à son bien-être. Jusqu'à la cime, presque. Et de là, basculant de tous côté par la seule force du vent, nous avions une vue imprenable sur le village, ses toits, son clocher, ses rues.
Tomber n'était même pas une option - l'arbre n'avait-il pas des branches, des centaines de bras pour interrompre une chute éventuelle? Nous étions en sécurité.
(Le pin, comme bien d'autres, a depuis cédé sa place au développement résidentiel, mais je le garde bien au chaud dans mon shack à souvenirs.)

Je n'ose aujourd'hui imaginer ce que ce serait de grimper à nouveau dans un arbre aussi grand. Danger, à chaque branche, à chaque mouvement : et si ça cassait et si y avait un nid de guêpe et si je glissais...

Et si, et si, et si. Danger, danger, danger.

« Je vais bientôt avoir besoin
d'un deuxième diachylon, papa. »
Mais voilà : il n'y a pas que les activités « casse-cou » qui recèlent leur part de danger. Vous êtes-vous déjà arrêtés pour réellement observer vos alentours, pour constater le danger imminent qui, à chaque seconde, vous menace? Pour un poupon, personne à mobilité réduite s'il en est une, tout est un danger : les coins de tables, des pics acérés; les pattes de chaises, autant d'obstacles insurmontables; les jouets qui traînent, une multitude d'occasions de se péter la baboune.

Prenez un geste simple comme marcher. Facile, non? Oh, oui, pour nous ça l'est, parce que ça fait des années que nous alignons pas après pas pour aller et venir où bon nous semble. Mais pour nos clones, c'est tout autre chose.
Ils doivent faire fi de la douleur, des ecchymoses, des pertes d'équilibre, et se lancer, comme ça, dans l'inconnu. « C'est un simple transfert de poids », me direz-vous, « s'agit de le faire! » Ben justement. Pour la petite créature qui s'élance en avant pour la première fois, c'est tout ce qu'il y a de plus effrayant. « Je dois faire confiance à la gravité : elle va ramener mon corps vers le bas en sûreté. Mais cette même gravité, c'est aussi elle qui veut que mon corps continue à descendre, jusqu'à ce que mes douce, tendre et fragiles lèvres, heurtant le plancher à toute vitesse, soient perforées par mes dents de lait. Y a rien là, marcher. Ou bedon je vais m'enfarger dans le chien, qui ne regarde jamais où il va, et je vais subséquemment aller me pétantabarnoucher la fiole sur la table du salon (ils les font bien trop solides). Et une deuxième tête fera son apparition. »

Vraiment, il y a de quoi devenir parano.

Sauf que ça a aussi du bon, parfois. Le fait est que Moumou, dans une autre vie, était fort probablement un aspirateur. Ou un de ces petits robots qui se promènent toute la journée tandis que vous êtes au travail et qui vous ramassent la poussière en un tournemain. Moumou, lorsqu'elle se promène à quatre pattes, le fait en gardant les yeux sur le sol devant elle et, si elle mange parfois très mal à l'heure des repas, refusant complètement et parfaitement d'avaler quoique ce soit, elle nous offre en revanche des performances de championne en rampant partout. La moindre miette malchanceuse se retrouvant sur son chemin, GLOUP!, est aussitôt avalée. Une miette de pain, une miette de chien, une miette de feuille morte, une miette de bouffe de chat, une miette de morceau de pierre. Tout y passe. Et la gueuse a même le culot de nous montrer sa prise avant de se l'enfourner et de mastiquer pensivement le pauvre objet sans défense. Et elle la montre pendant de longues secondes, en nous regardant, l'air de dire : "Tu la vois? Tu la vois plus!"

Donc j'ai hâte qu'elle ait eu assez de bleus pour TOUJOURS se déplacer à deux pattes. Si j'ai à choisir entre un p'tit Band-Aid de temps en temps ou des voyages à l’hôpital pour intoxication, je prends le Band-Aid. N'importe quand.

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Je pèche souvent d'exagération, mais c'est au moins un peu vrai : le fait de marcher comporte plusieurs phénomènes physiques complexes et inter-reliés qui, s'ils ne sont pas exécutés à la perfection, résultent en des bras, jambes, ou orgueils cassés. La gravité, le transfert de poids, l'Acte de Foi de se laisser aller au bon soin des forces de la nature pour se déplacer, ce n'est pas rien. Et on ne parle même pas encore de courir.
Je regarde aller la petite, à la découverte de tout en même temps : les goûts, les sons, les images, les couleurs, les mouvements... La découverte du monde, oui, mais surtout la découverte d'elle-même, par sa relation avec le monde et ses habitants, dont nous sommes, ses joies, ses peines, ses dangers. Beaucoup plus ses dangers qu'autre chose, il me semble, même si ce n'est probablement que le papa en moi qui parle, là. Ce papa qui voit les petites lèvres fendues, les bleus dans le front, les infections aux yeux, les grippes, et qui se demande, lui le grand dadais inapte de tellement de façons que ça devrait être vu comme de la polyvalence, qui se demande comment il a pu survivre à ses premières années. Mes parents ont dû capitonner la place mur à mur. Ou me capitonner, moi.

N'empêche : quand j'ai vu ma petite, pour la première fois, se lever sans appui et faire ses premiers pas, ça m'a fait tout chose dans mon cœur de papa... Elle marche! C'est merveilleux! C’est fantastique! C'est... c'est...

C'est dangereux...

(Entre parenthèses, je prends sans vergogne des images que je trouve sur Internet. C'est mal, je pense. Mais j'espère aussi que quelqu'un, un jour, utilisera le SUPERBE spermatozoïde que j'ai moi-même dessiné dans mon dernier billet. Ça serait pour moi un honneur. Allez, par ces lignes, je vous y autorise. Faites-moi honneur, allez. En attendant d'avoir une tablette à dessin numérique, j'emprunterai les images des autres, parce que Paint avec une souris, c'est la mort de la créativité en ce qui me concerne. Mea culpa, mea culpa, mea maxima culpa.)

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